RDC : Drôle de justice pour un responsable de l’opposition

RDC : Drôle de justice pour un responsable de l’opposition

Enfermé depuis 75 jours, la santé de Salomon Kalonda inquiète.

Mon frère est quelqu’un de très pudique. Il préférera rester dans sa cellule plutôt qu’apparaître diminué”, explique Moïse Moni Della, le “grand frère” de Salomon Kalonda, le conseiller politique de Moïse Katumbi, le principal opposant qui se dresse sur la route du second mandat rêvé par Félix Tshisekedi. Le “grand frère”, joint à Kisangani, évoque un “dossier politique” , “une détention arbitraire”.À travers Salomon, c’est Moïse Katumbi qui est visé”, poursuit-il, lui qui a passé plus de cinq mois dans les geôles congolaises fin 2016, sous le régime Kabila, accusé d’être l’auteur intellectuel d’émeutes qui ont fait plus de 50 morts en septembre 2017.

“j’étais détenu pour n’avoir rien fait”, nous expliquait-il lors à sa sortie de prison. Des termes qu’il applique aujourd’hui à son “petit frère” arrêté violemment, le 30 mai dernier, sur le tarmac de l’aéroport international de Ndjili, alors qu’il s’apprêtait à monter dans un avion en direction de Lubumbashi. Depuis, l’homme est détenu dans la prison militaire de Ndolo. La semaine dernière, souffrant, le détenu a été emmené pour quelques examens médicaux. Deux jours plus tard, il retournait à l’hôpital pour une journée d’examens. “Le médecin a prescrit douze jours de soins”, explique un de ses visiteurs. “Ce n’est pas banal, poursuit un de ses avocats qui pointe du doigt les lenteurs de l’administration à entendre “les appels du corps médical”.

“On nous explique que la demande doit suivre la voie hiérarchique”, poursuit, excédé, un de ses défenseurs. Dans les rangs militaires, certains expliquent que “dans ce dossier, pour remonter aux vrais donneurs d’ordre, il faut remonter très très haut dans la hiérarchie militaire”. Une remarque qui, pour beaucoup, confirme la portée très politique de ce dossier.

Des charges très légères ?

“Le dossier est vide”, explique un de ses avocats. “La seule chose que je puisse vous dire, c »est que les raisons pour lesquelles on l’avait interpellé, notamment, la détention du fameux pistolet Jéricho, n’ont même pas été retenues”, ajoute Me Hervé Diakiese, un autre avocat de l’équipe de Salomon Kalonda qui s’exprimait ce mercredi midi sur les ondes de la radio Top Congo.

“On a le sentiment que l’arrestation a précédé la collecte des informations et des preuves”, s’étonne un diplomate occidental sous couvert d’anonymat. L’homme tente un parallèle avec le dossier de l’assassinat de Chérubin Okende, le porte-parole du parti de Moïse Katumbi, retrouvé assassiné au volant de sa voiture le 13 juillet dernier. “Dans les deux affaires, la justice, qu’elle soit civile ou militaire, a été prompte pour échafauder les scénarios qui l’intéressaient… avant de devoir faire marche arrière, souvent discrètement, face à la réalité des faits. Le malaise est réel et les derniers éléments du dossier Kalonda sont très inquiétants”, poursuit-il, mettant en exergue “les délais très serrés accordés aux avocats pour préparer la défense de M. Kalonda”.

On a été avisé lundi de la fixation de sa comparution jeudi, explique un de ses avocats. Les délais sont incroyablement courts d’autant que, jusqu’à ce 15 août nous n’avons pas eu accès au dossier. C’est très problématique. On pourrait penser que ça démontre surtout une volonté de condamner notre client en ne nous permettant pas de préparer sereinement sa défense”, poursuit un de ses défenseurs qui espère “obtenir un délai supplémentaire” pour préparer la défense. “Pendant des semaines, le dossier s’est traîné et soudainement tout doit s’accélérer. Pourquoi ? Que signifie cette soudaine frénésie qui ne correspond pas au temps de la justice. On ne peut s’empêcher de penser que des ordres clairs ont été transmis”.

La poursuite d’un opposant, l’élimination d’un autre à la veille d’un scrutin majeur, met sérieusement en doute la perspective d’un passage par les urnes apaisé, démocratique et inclusif, comme le réclame la communauté internationale depuis des mois aux responsables congolais déjà arrivés au pouvoir en 2018 dans un climat aussi contesté que douteux.

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