Angola : Le MPLA sauve de justesse son pouvoir

Angola : Le MPLA sauve de justesse son pouvoir

Joao Lourenço devrait rempiler pour un second mandat de 5 ans.

Les rues de Luanda, la capitale angolaise, ont repris leur tranquille agitation ce vendredi. Les résultats de l’élection législative de ce mercredi n’ont pas encore été définitivement annoncés par la Commission électorale nationale mais avec 97,03 % des bulletins dépouillés, les “jeux sont faits”, comme aime le dire un ancien ministre MPLA. Son parti, au pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1975, devrait rester cinq années de plus à la tête de l’État. Mais ce scrutin, annoncé depuis des semaines comme le plus serré de l’histoire du pays, a tenu toutes ses promesses.

Si Joao Lourenço, le président sortant et tête de liste du MPLA devrait rempiler pour un second mandat de cinq ans (le chef de file du parti vainqueur devient automatiquement président), il devra composer avec un parlement où il a perdu la majorité des deux tiers qui lui laissait une totale liberté législative. Il ne dispose plus aujourd’hui que de 124 sièges sur les 223 de l’Assemblée nationale. L’Unita, son historique et principal adversaire décrochant 90 sièges, six sièges sont partager entre tris autres petites formations, tandis que trois sièges seront attribués aux représentants de la diaspora (en Belgique, lors du scrutin organisé ce mercredi, l’Unita, avec 125 voix, a devancé le MPLA, 95 voix, lors d’un vote marqué par le très faible taux de mobilisation.

Vingt pour cent en dix ans

Joao Lourenço devra donc aussi composer avec un parti qui ne cesse de perdre du terrain et qui a été lâché par 20 % de ses électeurs en deux scrutins. En effet, en 2012, le MPLA alors sous la coupe d’Eduardo dos Santos, décrochait encore 71 % des voix, il est aujourd’hui à 51,7 %, après être passé par 61 % en 2017.

L’usure du pouvoir”, se contente de lancer, en faisant la moue, Juanita, membre “depuis toujours du MPLA”, qui concède aussi que “l’Unita a fait une campagne très moderne qui a séduit la jeunesse”.

Adalberto Costa Junior (ACJ pour les Angolais), le nouveau leader de l’Unita a sans conteste été l’homme de ce scrutin avec des meetings engagés, des slogans qui claquent et une promesse de réformes économiques et de travail pour les jeunes qui a contrasté avec la campagne morose d’un MPLA incapable de se réinventer.

L’Unita refuse pour le moment de reconnaître sa défaite, tandis que les nombreux observateurs nationaux et internationaux ont tous validé l’organisation d’un scrutin qui s’est déroulé sans vraie fausse note aux quatre coins de l’Angola.

C’est la fin d’un cycle, prévient Carmino, enseignant à Luanda. Le fait qu’ACJ, qui vient du Portugal, qui n’a pas participé aux combats pour l’indépendance du pays, puisse arriver à la tête de l’Unita et réussir un tel score montre que l’ancienne garde est essoufflée. Lourenço sera le dernier de cette génération. Le prochain combat ne sera plus idéologique, il sera purement politique et économique”.

À Luanda, depuis jeudi en fin de journée, des petites manifestations menées par des jeunes et des très jeunes sont régulièrement dispersées par les forces de l’ordre qui quadrillent discrètement la ville.

Je prie pour que les résultats soient acceptés par tous”, grimace Gracia, installée sur un banc devant l’église de Nossa Senhora dos Remedios, l’ancienne cathédrale bâtie au milieu du XVe s. “Le pays a d’abord besoin de paix”.

Malgré le calme qui règne ce vendredi en début d’après-midi à Luanda, toute une génération semble en effet retenir son souffle, tandis que les responsables de la société civile ou des églises répètent leur appel au calme et félicitent les électeurs angolais pour “leur sens des responsabilités”.

Cinq ans pour préparer l’avenir

Ces messages sont orchestrés par le MPLA, s’insurge Dani, jeune danseur qui se rend à ses répétitions de capoeira (cette danse inventée par des esclaves angolais envoyés au Brésil) dans un parc qui borde la baie de Luanda. On n’a pas de travail, ceux qui sont au pouvoir ont eu 50 ans pour développer le pays et en fait ils se sont tous enrichis avec le pétrole, les diamants, les grandes sociétés. Regadez la misère. Elle est partout. Nous, on danse souvent sans avoir mangé. On se partage ce qu’on a, c’est aussi ça, l’esprit de la capoeira. On ne veut plus de cette classe”. D’autres danseurs arrivent, parfois bien jeunes, mais tous embraient pour dire leur fatigue et leur envie d’un nouvel Angola “le plus rapidement possible.”

Sauf scénario surprise, le MPLA aura pourtant cinq ans de plus pour obtenir des résultats concrets et répondre aux aspirations des Angolais. “Lourenço avait lancé de vraies réformes au début de son mandat pour diversifier les sources de revenus et d’emplois mais le Covid a tout anéanti, explique un petit entrepreneur local. Avec la fin de la pandémie et la hausse du prix du pétrole, le prochain gouvernement quel qu’il soit aura de vrais atouts. On a des raisons d’espérer”.

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