Depuis le génocide au Rwanda au milieu des années 90, alors que le démocrate Bill Clinton gérait son premier mandat à la Maison-Blanche, les États-Unis ont toujours été d’indéboulonnables soutiens pour le pouvoir de Kigali.
Les présidents passent aux États-Unis, quelle que soit la couleur politique de l’hôte de la Maison-Blanche, Paul Kagame, au pouvoir depuis 2000, garde ses entrées à Washington, au State Department et surtout un soutien indéfectible à la Defense intelligence agency (DIA), même quand le pouvoir rwandais est accusé de soutenir des mouvements rebelles qui déstabilisent l’est de la République démocratique du Congo.
Ce soutien peut-il être remis en question ? Rien n’est moins certain, tant les militaires et les responsables des services de renseignement américains apprécient la collaboration et les liens tissés avec un pouvoir stable dans cette région riche et donc stratégique.
Une certitude qui vient d’être quelque peu ébranlée cette fin de semaine après la sortie publique du sénateur démocrate Robert Menendez (68 ans), élu du New Jersey, une valeur sûre du parti, élu et réélu sans discontinuer depuis… 1992, d’abord comme député, avant de décrocher un des deux postes de sénateurs de l’État en 2006 et d’être réélu depuis à chaque scrutin.
En février 2021, ce vieux briscard de la politique américaine, compagnon de route de longue date du président Joe Biden, a décroché le poste de président du comité des Affaires étrangères du sénat des États-Unis.
“Accusé de manière crédible”
Dans un courrier envoyé fin de semaine dernière au Secrétaire d’État américain Antony Blinken, il met en garde : “L’armée rwandaise a été accusée de manière crédible de soutenir les rebelles du M23 en République démocratique du Congo (RDC) et de déployer ses soldats de l’autre côté de la frontière vers la RDC”, avant de poursuivre en rappelant qu’à “la fin des années 1990, le Rwanda et l’Ouganda avaient envahi la RDC, déclenchant une guerre régionale qui, selon diverses organisations internationales, avait causé pas moins de 5,4 millions de morts de 1998 à 2007 en raison du conflit, provoquant une crise humanitaire.”
“Une autre politique”
Il rappelle aussi les événements de 2012 et l’émergence du mouvement du M23. Des rebelles “qui avaient capturé la ville de Goma, dans l’est de la RDC, en tuant des centaines de civils et en déplaçant plus de 100 000 personnes. Dix ans plus tard, en 2022, le Rwanda a de nouveau envoyé des troupes à travers la frontière de la RDC et a réactivé le M23 en tant que milice par procuration, désormais responsable du meurtre de civils congolais, de troupes congolaises et de casques bleus de l’ONU”.
Robert Menendez pointe aussi le “avec inquiétude le mépris continu du gouvernement rwandais pour les droits de l’homme” et demande au chef de la diplomatie américaine d’envisager une autre politique à l’égard de Kigali qui est aussi accusé de “cibler” les ressortissants américains.
Une mise en cause du Rwanda qui pourrait immédiatement avoir des conséquences sur l’aide américaine à destination de Kigali. Robert Menendez explique en effet que dès ce jour il fera examiner “attentivement toute aide sollicitée au Congrès en faveur du Rwanda, et de faire suspendre toute assistance d’ordre sécuritaire, en commençant par plusieurs millions de dollars en soutien aux casques bleus rwandais”.