Avec Touki Bouki, Wend Kuuni, La Petite vendeuse de soleil, La Vie est belle, Lingui, les liens sacrés, Les Prières de Delphine… De juin à août, ce sera l’occasion de revisiter, sur grand écran à Flagey, des classiques africains d’hier et d’aujourd’hui venus du Burkina Faso, du Sénégal, de RD Congo et du Tchad
Du Sénégal au Tchad et du Burkina Faso au Congo, l’agence Flagey organise deux traversées partielles du continent africain sur grand écran durant cet été. Ses Caméras d’Afrique subsaharienne remonteront aussi le temps, des récits les plus anciens – Touki Bouki, Le voyage de la hyène de Djibril Diop Mambéty (Sénégal 1973) – jusqu’au plus récent : Lingui, les liens sacrés de Mahamat Saleh-Haroun (Tchad 2021).
Entre Djibril Diop Mambety – considéré comme l’un des pionniers du cinéma africain avec Sembène Ousmane – et Mahamat Saleh-Haroun, sélectionné au dernier Festival de Cannes, le lien transgénérationnel semble évident. Pour Sili, La Petite vendeuse de Soleil (1999), comme pour Maria, l’ado qui se retrouve enceinte, dans Lingui, les liens sacrés, la résignation n’est pas une option. Chacune entend se façonner un destin à la hauteur de ses espérances. Quitte, pour cela, à bousculer les lois établies par les hommes.
Quant à Touki Bouki, sa grande liberté de ton, son sens de l’ironie et sa formidable beauté formelle lui ont assuré le Prix de la critique internationale au Festival de Cannes en 1973, ouvrant aux cinéastes venus d’Afrique une place sur l’échiquier mondial.
Une jeunesse déterminée à faire entendre sa voix
La caravane cinématographique fera ensuite étape au Burkina Faso avec Wend Kuuni, le don de Dieu de Gaston Kabore (1983) et au Congo avec La Vie est belle de Mweze Ngangura et Benoît Lamy (1987), porté notamment par le célèbre chanteur congolais Papa Wemba. Deux films, aux ambiances bien différentes, qui convoquent le courage et la volonté de chacun de transformer son quotidien.
Entre Wend Kuuni, le jeune garçon muet recueilli à la sortie d’un village au Burkina Faso, et Kourou, musicien fraîchement débarqué à Kinshasa, qui espère faire carrière dans la musique, difficile d’imaginer deux réalités plus éloignées. Et pourtant, tous les deux tentent d’échapper à la cohorte des solitaires et des anonymes et de faire entendre leur voix… La détermination s’avère indispensable, dans les deux cas. Autre point commun : ces longs métrages ont tous les deux bénéficié d’une restauration numérique récente réalisée par la Cinémathèque royale de Belgique.
A ces cinq fictions s’ajoute un film documentaire : Les Prières de Delphine de la cinéaste Rosine Mbakam, Camerounaise installée à Bruxelles. On y retrouve les thèmes présents dans tous les films précités – lutte pour la survie, adversité, interdits, débrouillardise et tentation de l’exil (comme dans Touki Bouki de Djibril Diop Mambéty) – comme si le parcours de Delphine devait les condenser tous. Cette fois, pourtant, il ne s’agit pas d’une fiction mais bien d’un témoignage fort et poignant, partagé, au plus près, par la cinéaste qui connaît la jeune femme filmée depuis longtemps. Le miroir qu’elle lui tend n’en est que plus troublant.
En multipliant les modes de récits et les contrées visitées, cette modeste sélection de six films offre un premier aperçu de la diversité des cinémas d’Afrique. Entre contes villageois et fables urbaines, il y a plus d’un parallèle à tracer entre ces cinéastes de générations différentes, plaçant tous leurs caméras à hauteur d’humains pour relater des expériences résonnant bien au-delà du continent africain. Qu’il s’agisse de récits d’enfance ou de l’âge adulte, partout s’affichent la même débrouillardise, la même volonté de s’en sortir et les mêmes dilemmes face aux choix de vie. Dans la lutte contre l’adversité, quelle que soit sa couleur de peau, il importe toujours de savoir si l’être humain va céder ou se révolter contre son sort…
Chacun de ces films est montré quatre ou cinq fois en salle, entre début juin et fin août. Ce week-end, ce sera le tour de La Petite vendeuse de soleil (dimanche 5/06 à 14h). Les horaires détaillés et les achats de tickets sont à retrouver sur le site de Flagey.
Karin Tshidimba
nb: Dans un prochain article, nous détaillerons le programme des films d’Afrique prévus cet été à la Cinematek de Bruxelles.