Interview de Pierre Cantraine, coordinateur d’Africapsud chez l’AMO La Chaloupe depuis 7 ans.
Quelles sont les principales actions menées par votre ASBL ?
La Chaloupe, c’est une AMO (Action en Milieu Ouvert), un service d’aide à la jeunesse qui a pour objectif l’émancipation des jeunes. Tous nos projets sont développés par rapport à un diagnostic social qui s’établit via des réunions composées de tous les acteurs sociaux et de terrain d’une région bien définie. L’AMO doit ensuite pouvoir répondre à ce diagnostic en établissant des projets adéquats. Le projet Africapsud s’inclut dans ces 17 projets de l’AMO. Nous voulions rendre les séjours interculturels d’immersion accessibles à tout le monde car ils restent bien souvent trop élitistes.
Qu’est ce qui vous a donné l’envie de travailler dans l’éducation à la citoyenneté mondiale et solidaire (ECMS)?
J’étais en semi-décrochage à l’université parce que j’en avais marre des études. Je suis arrivé par hasard à la Chaloupe pour le projet Africapsud. J’ai adoré le projet. Cela m’a totalement reboosté dans mes études que j’ai poursuivies ainsi que mon TFE en lien avec Africapsud. Parce que j’avais vraiment envie que ce projet grandisse. Quand j’ai fini mes études d’éducateur, le poste s’est libéré et on m’a proposé de coordonner le projet.
Pourquoi votre ASBL a-t-elle décidé de s’engager dans le projet MWA ?
À l’époque le monde de l’ECMS était très fermé, très cadenassé. On a décidé de participer pour rencontrer les personnes actives dans le domaine. On était sensibles au fait qu’en échangeant on pourrait encadrer et préparer au mieux les jeunes. MWA a vraiment permis qu’au sein du même projet il y ait un mélange entre ONG et ASBL très riche. Votre partenariat avec Brussels Airlines est aussi une grande aide puisqu’on fait partir un public fragilisé en Afrique et que l’aspect financier est important pour eux.
Comment se sont déroulées cette édition 9 (2021-2022) et l’immersion au Bénin?
Cette année, c’était très chouette ! Malgré le Covid, l’année de formation s’est bien déroulée. Le stress relatif à toutes les procédures était difficile mais au final on s’en est plutôt bien sortis !
Quel impact avez-vous pu constater sur les élèves/professeurs participants ?
De manière générale, c’est une graine qu’on sème chez les jeunes qui mûrit de manière différente en fonction du terreau dans lequel ils ont grandi. Ce que je constate c’est que MWA donne un premier élan aux jeunes. Le résultat, c’est vraiment un changement de mentalités et de consommation. Il y a une prise de conscience que tout acte qu’ils vont poser ici a des répercussions directes sur leurs amis au Bénin. Le monde est par ce biais personnalisé. La plupart des jeunes gagnent également en confiance en eux et en capacité relationnelle. L’objectif, c’est de casser les préjugés et les stéréotypes que les jeunes ont au Sud comme au Nord, parce que les Béninois sont aussi remplis de préjugés. Ils pensent qu’on trouve des IPhone dans la rue et que l’argent pousse sur les arbres. Ils se rendent compte que les jeunes font parfois face aux mêmes problématiques qu’eux. Et puis, puisqu’il y a le double échange, c’est très chouette d’être accueillants et puis accueillis, même si c’est beaucoup plus compliqué de faire venir des jeunes Béninois en Europe, au niveau des passeports, visa, etc.
Quels sont vos souhaits pour l’avenir de ce type de projet ?
On aimerait évidemment faire autant de rencontres ici qu’au Bénin. On continue à penser que les immersions sont nécessaires parce que le changement d’environnement bouscule les repères et les jeunes se retrouvent dans d’autres dispositions pour interagir. Mon souhait serait que les jeunes conscientisent que la rencontre se fait d’abord en Belgique et qu’on n’est pas obligés d’aller loin pour se rencontrer. Il y a une vraie question à avoir sur l’écologie mais pour nous les échanges interculturels passent aussi par des chocs interculturels. Le simple fait de sortir de sa zone de confort te fait perdre toutes tes notions et tu es prêt à en accueillir de nouvelles.