RDC: Passé colonial: des documents digitalisés de cours martiales remis aux archives congolaises

RDC: Passé colonial: des documents digitalisés de cours martiales remis aux archives congolaises

Des professeurs des universités bruxelloise ULB et VUB ont officiellement remis vendredi matin des documents d’archives coloniales digitalisés à l’Institut des Archives Nationales du Congo (INACO). La remise est une concrétisation du projet de recherche et de numérisation « Digicoljust » (« Co­lonial Violence, Subaltern Agency and Shared Archival Heritage: A Digital Platform of Colonial Judiciary Sources »), soutenu par la Politique scientifique fédérale. Il s’agit d’une copie digitale d’archives judiciaires de l’époque coloniale, « un premier échantillon », a expliqué la professeure de l’ULB Amandine Lauro lors de la remise symbolique, dans le cadre d’une « journée d’études Kinshasa-Bruxelles » dans les locaux de l’ »éna » (école nationale d’administration) congolaise. Les documents concernent « plus de 1.200 procès de soldats congolais et européens » devant des cours martiales de l’État Indépendant du Congo (1885-1908) et du Congo belge (1908-1960). 

Ils regorgent d’informations « sur le maintien de l’ordre colonial tel qu’il s’exerçait au quotidien », et « donnent à entendre les voix d’une multiplicité d’acteurs subalternes peu audibles, soldats africains, population civile », note Amandine Lauro, qui co-dirige le programme Digicoljust.

Devant les cours martiales de l’époque coloniale, des soldats congolais et des officiers belges étaient jugés pour violations du droit militaire et civil. Selon Digicoljust, ces archives de procès « sont particulièrement intéressantes pour étudier les troubles quotidiens qui agitaient les forces armées congolaises (insubordination, toxicomanie, violence sexuelle, etc.), les différentes formes de gouvernance militaire (en temps de paix comme en temps de guerre), ainsi que les formes de résistance au pouvoir colonial et leur répression par les autorités (via l’instauration d’un « régime militaire » dans les régions jugées instables) ».

Il y a en Belgique un regain d’intérêt marqué pour l’héritage du passé colonial du pays et toutes ses implications. En témoignent le débat sur la décolonisation de l’espace public à Bruxelles, et la mise sur pied au niveau fédéral d’une commission parlementaire chargée de faire la clarté sur l’État indépendant du Congo (1885-1908) et sur le passé colonial de la Belgique au Congo (1908-1960), au Rwanda et au Burundi (1919-1962) et d’en tirer des enseignements pour l’avenir. Le gouvernement s’est par ailleurs lancé sous l’égide du secrétaire d’Etat à la Politique scientifique, Thomas Dermine, dans un vaste travail de restitution du patrimoine emporté des colonies durant cette période.

L’héritage écrit de l’administration coloniale belge est conservé à Bruxelles. Mais « les chercheurs du sud ont du mal à avoir accès à ces sources et archives », note Benoit Henriet, professeur à la VUB et chercheur sur l’histoire coloniale et postcoloniale de l’Afrique centrale. Le projet Digicoljust vise justement à favoriser une dynamique de partage, indique-t-il. Ce premier échantillon sera mis en ligne plus tard dans l’année.

La journée d’étude « Kinshasa-Bruxelles » de vendredi était organisée dans le cadre de la mission politique, culturelle et académique bruxelloise qui avait lieu cette semaine en RDC, menée par le ministre-président Rudi Vervoort et combinée à une mission économique tri-régionale.

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