Il y a un an débutaient les affrontements entre pouvoir central et indépendantistes tigréens.
Les autorités de la capitale éthiopienne Addis Abeba ont invité mardi ses cinq millions d’habitants à faire enregistrer les armes en leur possession, ont rapporté les médias d’État, cités par Al Jazeera, en vue de se préparer à défendre la ville alors que le TPLF (Front de libération du peuple tigréen) a indiqué vouloir y étendre les combats.
Ces derniers ont débuté le 4 novembre 2020, lorsque le pouvoir central a envoyé des troupes au Tigré (nord du pays) pour répondre à des attaques armées contre des casernes de l’armée nationale. Cela faisait alors plusieurs mois que le TPLF, au pouvoir dans cette province, entretenait un bras de fer avec Addis Abeba pour y renforcer l’autonomie que garantit la Constitution.
Pas accepté de perdre le pouvoir
Le TPLF a dominé pendant 27 ans (1991-2018) la coalition multiethnique au pouvoir à Addis Abeba et, bien que les Tigréens ne représentent que 6 % de la population du pays, en a profité pour largement se servir en postes de pouvoir et de rapport économique.
Les Tigréens n’ont pas supporté la fin progressive de cette domination dans les mois qui ont suivi la nomination comme Premier ministre (avril 2018) d’Abiy Ahmed, un Oromo, l’ethnie la plus nombreuse du pays (35 %).
Les combats se rapprochent de la capitale
Le Premier ministre a décrété mercredi l’état d’urgence pour six mois, alors que les forces armées tigréennes approchent de la capitale, dont ils ne seraient éloignés que de 300 km.
Si le TPLF a longtemps dominé la coalition de mouvements armés qui avait renversé le pouvoir du dictateur Mengistu en 1991, c’est parce qu’il était le meilleur groupe armé du lot – avec les guérilleros de l’Érythrée (devenue indépendante de l’Éthiopie en 1993), voisins et cousins des Tigréens. Le TPLF a entretenu sa tradition militaire au sein de l’armée nationale, où il tenait un nombre important de postes. Lors de la rupture avec les « frères » éthiopiens, ces officiers et soldats ont rejoint le Tigré. Redoutables, ils peuvent infliger de lourdes défaites à l’armée nationale, largement étêtée lors de la rupture.
Ainsi, pendant plusieurs mois, les combats entre armée nationale (appuyée par l’armée érythréenne) et indépendantistes tigréens sont restés localisés au Tigré, où le TPLF a reconquis sa capitale, Mekele, au bout de six mois, puis presque toute la province, sauf l’ouest.
Par après, les combats se sont peu à peu étendus à d’autres régions de l’Éthiopie – les provinces Amhara et Afar – et un groupe armé oromo (dissident du Front de libération de l’Oromo, qui avait accepté l’offre de paix d’Abiy Ahmed en 2018), l’Armée de libération oromo (OLA), s’est joint à la guerre contre Addis Abeba. Comme le TPLF, l’OLA a revendiqué la prise de villes.
« Mourir pour l’Éthiopie est un devoir »
Lundi, le Premier ministre a, une nouvelle fois, promis d’écraser les rebelles, assuré que « mourir pour l’Éthiopie était le devoir de chacun » et incité les citoyens à prendre les armes qu’ils pouvaient pour se battre.
Les agences humanitaires de l’Onu accusent Addis Abeba d’entraver la distribution d’aide au Tigré, où 400 000 personnes seraient en danger de mourir de faim, tandis que 2,5 millions d’habitants ont été déplacés dans tout le pays, principalement au Tigré.
Abiy Ahmed avait reçu le prix Nobel de la paix en 2019 pour ses efforts en vue de faire la paix avec l’Erythrée, à laquelle un conflit territorial avait opposé l’Éthiopie. Les combats avaient duré de 1998 à 2000, faisant de 70 000 à 100 000 morts et d’importantes destructions, mais Addis Abeba avait refusé jusqu’en 2018 de mettre en œuvre l’accord de paix signé avec Asmara sous l’égide de la communauté internationale.