RDC : Le Katanga se mobilise aussi contre le choix de Kadima (Vidéo)

RDC : Le Katanga se mobilise aussi contre le choix de Kadima (Vidéo)

Cela se corse pour le président congolais Félix Tshisekedi. Samedi 16 octobre, dans une Assemblée nationale en pleine ébullition, sa large majorité parlementaire, l’Union sacrée, construite à coups de débauchages et de largesses financières douteuses, se prononçait en faveur de la candidature de Denis Kadima Kazadi, au poste de président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni – rebaptisée “Commission électorale non indépendante”, par le président de cette Assemblée nationale, dans un lapsus qui a fait le bonheur des réseaux sociaux).


Pour parvenir à ce vote, les élus de la majorité présidentielle, née du divorce entre les plateformes politiques de Tshisekedi et Kabila, ont accommodé à leur façon quelques textes légaux qui prétendaient organiser ce scrutin qui aura un impact majeur sur les futures élections présidentielle et législatives prévues pour fin 2023. Selon ces textes, le nom de ce candidat ne pouvait notamment n’être présenté qu’après un consensus entre huit confessions religieuses. Or, ici, foin de consensus, les Églises catholique et protestante ont toujours refusé de soutenir la candidature de Denis Kadima Kazadi, jugé beaucoup trop proche de l’actuelle équipe au pouvoir.
Qu’à cela ne tienne, fort de leur large majorité, les élus de l’Assemblée nationale ont accepté d’étudier ce dossier et ont désigné le favori du pouvoir à la tête de la Ceni. Mieux, ils ont même pourvu la plupart des sièges du bureau de cette Ceni en multipliant les combines.
Depuis cette date, la balle est dans le camp de Félix Tshisekedi. C’est lui qui doit entériner ce choix par une ordonnance présidentielle. On se souviendra qu’en juin 2020, avant le divorce Tshisekedi – Kabila, un scénario identique, avec les mêmes acteurs et la même absence de consensus, avait débouché sur un vote en faveur du candidat soutenu par la Kabilie : Ronsard Malonda. Un choix que le président Tshisekedi a refusé d’entériner.
Les mêmes causes produiront-elles les mêmes effets. Pas évident. Félix Tshisekedi a dû batailler ferme – et acheter les consciences à coups de billets verts – pour imposer son candidat et ses partisans – vus en train de chanter victoire au parlement – ne comprendraient pas qu’il n’aille pas au bout de la logique.

Pression maximale

Mais si les cadres de son parti et certains membres de l’Union sacrée veulent un passage en force qui, ils l’espèrent, leur permettrait d’assurer d’ores et déjà leur prochain mandat au nom du “service rendu”. L’opposition politique, emmenée par le FCC, la plateforme des élus demeurés fidèles à Joseph Kabila, et Martin Fayulu, le vrai vainqueur de la présidentielle de décembre 2018, ne se sont pas fait prier pour dénoncer cette nouvelle “supercherie” obtenue “à grand renfort de débauchages”.
L’Église catholique n’a pas tardé non plus à réagir par la voix de l’abbé N’shole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco). Dès le lendemain du vote à l’Assemblée nationale, il déclarait : “Le président de la République a encore l’occasion de se rendre crédible par rapport à ses promesses faites à la Nation pendant les consultations”, avant de poursuivre : “J’ai du mal à croire que ce qui s’est passé au Parlement, serait les instructions que le président a données. Si c’est ça, alors ça devient grave et on aurait à faire à un comité central du temps de Mobutu. […] On se rend bien compte qu’on fait un pas en arrière et c’est triste. Si on regarde dans le passé, on se souviendra qu’une bonne partie de ces députés n’ont pas été votés (élus) mais fabriqués par le laboratoire de la Ceni. C’est à cela qu’on voudrait nous amener ?” Une sortie ferme mais prévisible. La mobilisation contre ce coup de force de l’Assemblée nationale de certains partis membres de l’Union sacrée l’était moins.

Mobilisation à Lubumbashi

L’UNC de Vital Kamerhe, l’ancien colistier de Tshisekedi (condamné à 20 ans de prison), a dit tout le mal qu’il pensait de ce vote. Mais c’est ce jeudi à Lubumbashi que le risque d’implosion de la majorité s’est étalé au grand jour. Dans une sortie improvisée qui a drainé les foules, Moïse Katumbi, ancien gouverneur du Katanga, membre de l’Union sacrée, a marché dans la capitale du Haut-Katanga, rapidement entouré par une marée humaine, pour mobiliser les siens. Après avoir appelé à la vigilance (“ouvrez les yeux et les oreilles sur la Ceni”), il a annoncé qu’une grande marche allait être organisée contre la volonté d’imposer Denis Kadima Kazadi à la tête de la Ceni.
Félix Tshisekedi est pris entre la volonté de son clan, déterminé à un passage en force, et la mobilisation d’une coalition de plus en plus large qui l’appelle à ne pas franchir le Rubicon. La mobilisation du Katanga, coffre-fort du pays, pourrait être un élément central de cette crise. Jusqu’ici, le clan présidentiel, sûr du fait accompli, affirmait qu’il ne reculerait pas “devant quelques manifestants”. Mais même dans l’entourage présidentiel on doit savoir qu’aucun pouvoir en RDC ne peut tenir face à la paralysie du Katanga.

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