La Guinée-Conakry pourrait vite déchanter

La Guinée-Conakry pourrait vite déchanter

Commentaire par Marie-France Cros

Après le Mali en 2020, le Tchad en avril dernier, voici la Guinée-Conakry théâtre, à son tour, d’un coup d’État militaire. Pour beaucoup de Guinéens, le président déchu, Alpha Condé, ne l’a pas volé.

Longtemps opposant, n’avait-il pas souvent critiqué les chefs d’État qui s’incrustaient au pouvoir, avant de faire modifier la Constitution, au printemps 2020, afin de pouvoir se présenter à un troisième mandat, interdit, en octobre dernier ? Malgré de nombreuses protestations, réprimées dans le sang : 20 à 50 morts, selon les sources, et des dizaines de blessés par balles, essentiellement des civils.

Reste que l’armée guinéenne n’est pas à sa place au sommet de l’État. Comme leurs homologues maliens, les putschistes de Conakry ont promis un retour du pouvoir aux civils après une transition. Les Maliens craignent que cette promesse ne soit pas respectée ; peut-on avoir plus confiance en Guinée ?

Comme l’armée malienne, l’armée guinéenne présente de fâcheux précédents en matière de gouvernement : corruption, gabegie, répression, violences. Son plus haut fait d’armes ? Le 28 septembre 2009, des centaines de militaires avaient ouvert le feu sur des milliers de personnes pacifiques, rassemblées dans le stade de Conakry pour protester contre le projet du chef de la junte – au pouvoir depuis la mort du Président, le général Lansana Conté, en 2008 – le capitaine Moussa Dadis Camara, de se présenter à l’élection présidentielle promise par les putschistes. Ils avaient fait 157 morts et, dans la confusion provoquée, violé une centaine de femmes, dont certaines étaient restées leurs captives durant plusieurs jours.

Le responsable du putsch de dimanche, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, est, depuis 2018, le chef de l’unité d’élite Groupement des Forces Spéciales, chargé de lutter contre le terrorisme. Ce colosse, diplômé de l’École de guerre de Paris, marié à une Française et ancien instructeur à la Légion étrangère française, est d’ethnie malinké, comme Alpha Condé. Il n’a eu aucun scrupule à se retourner contre celui qui l’avait élevé lorsque “le Vieux”, il y a peu, ne l’a pas appuyé pour faire de son unité un corps autonome, indépendant du ministre de la Défense.

Et c’est sur lui que l’on compte pour rendre le pouvoir aux civils ?

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