RDC : Qui sont les assassins de l’ambassadeur d’Italie ?

RDC : Qui sont les assassins de l’ambassadeur d’Italie ?

Lundi 22 février, sur le coup de 10 heures, alors qu’il circule dans un mini-convoi du Programme alimentaire mondial (PAM) dans le Nord Kivu, l’ambassadeur d’Italie M. Luca Attanasio est mortellement blessé, tandis qu’un chauffeur congolais, Mustapha Milambo, et un policier italien, Vittorio Lacovacci) commis à sa garde seront abattus.  Vingt-quatre heures après les faits de nombreuses questions, sans réponse pour l’instant, apparaissent. Le président Tshisekedi a envoyé mardi une équipe d’enquêteurs dans la province du Nord-Kivu pour rechercher les auteurs de l’attaque du convoi.

Comment expliquer qu’un ambassadeur puisse se retrouver dans cette région sans escorte ?

Selon un responsable humanitaire de l’ONU dans le pays, la route empruntée ne nécessitait pas d’escorte militaire. « Cette route était validée sans escorte, mais avec obligation d’un convoi de deux véhicules minimum« , a déclaré mardi à l’AFP cette source s’exprimant sous le couvert de l’anonymat.
Le PAM a de son côté indiqué dans un communiqué lundi que l’attaque s’est produite « sur une route qui avait été précédemment validée pour circuler sans escorte sécuritaire ».
Mais certains membres congolais des services de sécurité, joints par LalibreAfrique ne cachent pas leur surprise. « C’est un des endroits les plus dangereux du pays et cela ne date pas d’hier », explique l’un d’eux sous couvert d’anonymat. « Qui plus est, les services de renseignement congolais semblaient même ne pas être au courant du déplacement de l’ambassadeur, si vous lisez bien le communiqué du ministère de l’Intérieur. C’est quand même très inquiétant et très illustratif d’une forme de laisser-aller généralisé dans les services. »
Un communiqué signé par le directeur de cabinet adjoint du ministère de l’Intérieur, le 22 février, explique « les services de sécurité et les autorités provinciales n’ont pu, ni assurer des mesures de sécurisation particulière du convoi, ni leur venir en aide faute d’information sur leur présence dans cette partie du pays pourtant réputée instable et en proie à l’activisme de certains groupes armés rebelles nationaux et étrangers ».  (Voir ci-dessous)
Que s’est-il réellement passé ? Selon le gouverneur de la province du Nord-Kivu Karly Nzanzu Kazivita interviewé par des radios congolaises, les passagers des deux véhicules ont été victimes d’un rapt par un groupe de « bandits qui avaient six armes ». « Ils ont d’abord fait des tirs de sommation sur le convoi des véhicules du PAM qui se rendait à Rutshuru », poursuit le gouverneur. « Les membres du convoi ont été emmenés dans le Parc des Virunga. Pendant qu’ils marchaient, ils ont rencontré les éco-garde avec l’armée congolaise. Ceux-ci ont évidemment tenté de libérer les otages. Pendant les échanges les assaillants ont préféré tirer sur le garde du corps de Monsieur l’ambassadeur et ensuite sur l’ambassadeur ». Le gouverneur explique qu’il a pu obtenir ces informations grâce à un entretien avec le chauffeur survivant qui lui a aussi affirmé que les assaillants parlaient Kinyarwanda et qu’ils demandaient de l’argent et comptaient emmener les otages « très loin dans le fond du Parc national des Virunga ».
Qui sont les assassins ? Rapidement après les faits, les autorités congolaises ont accusé les  FDLR, les rebelles des Forces démocratiques de libération du Rwanda d’être derrière cette attaque. « À 500 m (du lieu de l’attaque), les ravisseurs ont tiré à bout portant sur le garde du corps (italien), décédé sur place, et sur l’ambassadeur, le blessant à l’abdomen », explique un communiqué de la présidence congolaise. Une version présentée comme crédible par un expert du Baromètre sécuritaire du Kivu (KST), « les FDLR sont à proximité du lieu où l’attaque a eu lieu. Ca relève du domaine du possible que ces rebelles rwandais soient responsables de cette attaque », a-t-il expliqué à l’AFP.
 Les FDLR de leur côté nient toute intervention dans cette attaque et pointent, dans un communiqué publié mardi 23 février au matin, la responsabilité des forces armées congolaises ou rwandaises.
Ils y affirment que « le convoi de l’ambassadeur a été attaqué dans une zone dite des  trois antennes, près de Goma sur la frontière avec le Rwanda non loin d’une position des FARDC (Forces armées de la RDC) et des (…) Forces rwandaises de Défense » (armée rwandaise).
« Les responsabilités de cet ignoble assassinat est à rechercher dans les rangs de ces deux armées », accusent les rebelles.
Le secrétaire général des Nations unies a appelé le gouvernement congolais à « enquêter avec diligence » sur cette attaque, condamnée fermement dans une déclaration par les 15 membres du Conseil de sécurité de l’ONU.
« Mourir pour la paix au Congo »
Dans l’est du Congo, l’assassinat de l’ambassadeur Luca Attanasio a déclenché une vague de critiques à l’égard du pouvoir congolais. Plusieurs responsables locaux ont rappelé sur les réseaux sociaux et par communiqués la promesse faite par le président Tshisekedi de ramener la paix dans l’est de la RDC. “Notre combat sera celui de vous apporter la paix, une paix définitive, une paix nécessaire pour la stabilité de notre pays. Et cette paix croyez-moi, je suis prêt à mourir pour qu’elle soit une réalité”, avait lancé le chef de l’État congolais lors d’un rassemblement public à Bukavu, dans le Sud-Kivu, le 7 octobre 2019.
Lundi soir, à Kinshasa, le gouvernement congolais a tenté d’éteindre cette vague de critiques en s’engageant à faire la lumière sur cette attaque. Une sortie qui a encore accentué la colère dans le pays où cette “mobilisation de Kinshasa pour la mort d’un diplomate occidental” est vue comme “preuve du manque d’intérêt de nos responsables pour notre sort quotidien”, expliquait lundi soir le maire d’une commune du Nord-Kivu.

RDC : Il y a un an, Félix Tshisekedi annonçait être prêt à mourir pour la paix dans l’Est

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