RDC : Les évêques se repositionnent face au pouvoir de Kabila

RDC : Les évêques se repositionnent face au pouvoir de Kabila

Les archevêques et évêques congolais membres de la Cenco ont bouclé ce vendredi 23 leur 54e assemblée plénière ordinaire à Kinshasa. L’occasion pour les membres de la Cenco, qui ont porté à bout de bras l’Accord de la Saint-Sylvestre, de jeter un regard critique sur la situation en RDC. Le titre de cette lettre a le mérite de la clarté : Le pays va très mal. Debout Congolais

Dès les premières lignes le ton est donné : « Nous sommes profondément inquiets et préoccupés par la détérioration continue de la situation économique, sécuritaire et humanitaire ainsi que par l’impasse politique actuelle », lancent les évêques.

Sur le plan économique, le constat est accablant. La relative stabilité économique de ces dernières années c’est du passé, écrivent-ils en substance, épinglant le recul du taux de croissance et la dépréciation du franc congolais. Dans la foulée, ils pointent du doigt la corruption, l’évasion fiscale, le détournement des fonds publics qui « ont atteint des proportions inquiétantes à tous les niveaux. Un groupe de compatriotes, abusant manifestement de leur pouvoir, s’octroient des avantages économiques faramineux au détriment du bien-être collectif ».

Conséquence de cette situation, ce sont les familles congolaises qui encaissent la crise. « Les conditions de vie sont devenues plus que précaires ». Et de stigmatier la faim, le manque de soins de base et l’incapacité pour de trop nombreux Congolais de scolariser leurs enfants.

Et les évêques mettent en garde contre « l’explosion du chômage des jeunes » qui favorise la grogne sociale mais aussi « le bandtisme et le recrutements de jeunes dans les innombrables milices ».

Un chaos généralisé

Dans la foulée, ils abordent le domaine sécuritaire et humanitaire, revenant sur « l’insécurité quasi-généralisée à travers le territoire national » qui « porte atteinte à la dignité humaine ».

Le Kasaï tient évidemment une place centrale dans cette énumération de catastrophes humaines. Mais les évêques pointent aussi la présence « massive, incontrôlée et permanente des groupes armés étrangers sur le territoire national ».

Le évêques abordent aussi le drame des kidnapping et les assassinats des enfants, les enlèvements de personnes (…) sans oubier « les attaques de paroisses et autres structures de l’église catholique ».

Sur les évasions massives qui ont émaillé l’histoire toute récente de la RDC, ils n’hésitent pas à parler d’« évasions apparemment programmées des détenus de la prison de Makala et Matete à Kinshasa, de Kasangulu, de Kalemie et de Béni qui demeurent pour nous un grand point d’interrogation ».

D’ou vient la crise ?

Pour les évêques, pas de doute, cette crise socio-économique est principalement due « à la non-organisation des élections conformément à la constitution ». La non application de l’Accord de la Saint-Sylvestre  est évidemment mise en exergue et les évêques écrivent « des prétendues solutions mises en place ne contribuent pas à la cohésion nationale. Elles risquent plutôt de hâter l’implosion de notre cher pays »  et d’ajouter les tripatouilages autour de l’arrangement particulier – qui devait être finalisé pour la mise en oeuvre de l’Accord – et le quasi « enterrement » du Conseil National du suivi de l’Accord, « organe fondamental ».

Pour sortir de cette crise, le évêques mettent en avant le refus de baisser les bras et la nécesité de se « mettre debout ».

Et les évêques congolais d’insister sur la nécessité de ne pas céder « ni à la peur, ni au fatalisme ». « Une minorité de concitoyens a décidé de prendre en otage la vie des millions de Congolais. C’est inacceptable ! Nous devons prendre en main notre destin commun ».

Pour sortir de cette crise, les évêques exigent la tenue des « élections présidentielle, législatives et provinciales avant décembre 2017 ».  Dans la foulée, ils envoient un message à la Ceni qui doit travailler à la confection d’un fichier électoral fiable. Et rappellent encore « la valeur sacrée et inviolable de la vie humaine. C’est pourquoi nous demandons la mise sur pied d’une enquête sérieuse et objective pour établir les responsabilités sur les atrocités commises au Grand Kasaï ».

Sans nommer le moindre responsable, les évêques, qui n’ont pas apprécié d’être utilisés par le pouvoir pour passer le cap du 19 décembre, date de la fin de mandat du président Kabila, ciblent clairement le pouvoir en place et demandent au peuple congolais de se « mettre debout » et de ne plus accepter d’être dévorés par cette « petite minorité » qui exploitent la RDC à des fins personnels.

En appelant tous les chrétiens, à partir du 30 juin, « à un moment de prière intense et de jeûne pour la nation », les évêques semblent vouloir reprendre le rôle central qu’ils ont perdu, aux yeux de très nombreux Congolais, en acceptant de prolonger les négociations politiques de novembre-décembre 2016.

Un nouveau bras de fer s’installe en RDC.

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