« Ouvrir la voix »: 24 voix puissantes, chantres de l’afroféminisme

« Ouvrir la voix »: 24 voix puissantes, chantres de l’afroféminisme

Ce qui frappe, c’est l’émotion qui, une ou deux décennies après les faits, se niche toujours dans leurs voix. Des voix affirmées et fortes qui, soudain, semblent se fissurer de l’intérieur en revivant ces scènes de rejet, de déroute ou d’humiliation qu’elles ont accepté de partager avec la réalisatrice Amandine Gay.

Au fil de ses nombreux thèmes, son film Ouvrir la voix*** fait tomber les barrières, brise les silences et braque les projecteurs sur tout ce que ces 24 jeunes femmes ont longtemps tu ou caché (voir extraits vidéo ci-dessous).

(mise à jour) Un film à (re)voir le 20/12 à 21h50 sur Be TV.

La nécessité de lutter contre le racisme larvé ou affiché, lorsqu’on postule pour un travail ou qu’on cherche un logement. Le rapport difficile aux études et au travail, la volonté de se dépasser et de lutter contre les clichés dès le collège, la stigmatisation sociale et la construction mentale de nombre de leurs semblables. Le besoin de se fondre dans la masse, de viser l’invisibilité ou, au contraire, de briller. Il ya tout cela et bien plus encore dans le documentaire Ouvrir la voix.

Entièrement écrit et réalisé par Amandine Gay, le film interroge le millefeuille des identités de toutes celles qui ont accepté de témoigner. Être noire, femme, d’origine africaine ou afropéenne. Le rapport compliqué au corps et aux cheveux, un corps trop souvent « chosifié, animalisé, véhiculant le fantasme de la femme noire ». Un corps aussi étrangement absent des écrans que des livres d’histoire.

Un film, fruit d’une intense mobilisation

Deux heures durant le film livre les témoignages de 24 jeunes femmes d’origine africaine, résidant en Belgique ou en France, qui évoquent leur rapport à leur identité mixte, à la fois d’ici et de là-bas. En résulte un travail remarquable, restitué sans commentaires ni voix off, mais construit en suivant différentes affirmations qui cristallisent bien leurs difficultés ou questionnements quotidiens.

«Un film avec des Noirs, c’est un film communautariste, un film avec des Blancs, c’est juste un film», fait remarquer l’une d’entre elles. Le tout est émaillé de quelques rares extraits des spectacles dans lesquels celles qui sont à la fois témoins et artistes donnent à voir leur art.

Ce documentaire éloquent est le résultat de trois ans de mobilisation et de combat. D’un véritable bras de fer, d’où le nom donné à la société de production d’Amandine Gay, créée spécialement pour l’occasion.
Devant l’impossibilité de trouver des financements pour son projet auprès du Centre national du cinéma (CNC), la réalisatrice s’est tournée vers le financement participatif qui lui a permis de rassembler les 17 000 euros permettant de couvrir les dépenses jusqu’aux premières sorties en salle. Le film a ensuite connu une jolie carrière en France en 2017, devenant porte-drapeau des associations féministes et antiracistes par son propos à la fois juste, posé et extrêmement porteur.

En Belgique, Ouvrir la voix n’a connu que quelques projections éparses. Il serait donc dommage de rater l’occasion de le découvrir ce mardi à 20h30 sur Be TV. Et ensuite, à l’horaire de votre choix par le biais de Be à la demande.

Karin Tshidimba

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