Par François Misser
La perspective du déclassement de portions du Parc, inscrit au Patrimoine de l’humanité, soulève un tollé chez les ONG congolaises.
Par François Misser
La perspective du déclassement de portions du Parc, inscrit au Patrimoine de l’humanité, soulève un tollé chez les ONG congolaises.
La récente révélation par l’ONG britannique Global Witness de l’intention de Kinshasa d’autoriser l’exploitation pétrolière dans deux parcs classés au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO
, suscite une levée de boucliers chez les ONG congolaises. Dans une déclaration publiée le 4 mai, 19 organisations de la Société civile et des Forces vives du Nord-Kivu se disent “scandalisées” par le projet de désaffectation d’une partie des blocs pétroliers 4 et 5 du Parc national des Virunga et des blocs 1 et 2 du Parc de la Salonga, présenté au gouvernement, le 28 mars 2018 par le ministre des Hydrocarbures, Aimé Ngoi Mukena. Au total, 2,767,5 km2 devraient être déclassés dans la Salonga, sanctuaires des singes bonobos, outre 400 km2 du bloc 5 du Graben Albertine et la totalité du bloc 4 (1320,75 km2), représentant 21,5% de la superficie totale du Parc des Virunga,.“Nous ne cesserons jamais de rappeler que les activités liées à l’exploitation du pétrole présentent les risques suivants : (…) c’est un écosystème très fragile et très vulnérable, (…),face à toute forme de pollution surtout par les hydrocarbures et dont les effets sont connus par tous, à savoir, la destruction de la biodiversité en général, la pollution de l’eau du bassin du Nil”, indique la déclaration. Celle-ci rappelle que le parc des Virunga est “une zone de nidification des oiseaux migrateurs venus du monde entier” et “une zone stratégique en tant que bouclier contre le changement climatique”. De surcroît, la société civile s’inquiète de la menace sur l’existence des tourbières du Parc de la Salonga que fait planer l’exploitation pétrolière.
Rebelles Maï Maï
Tout en considérant “délirantes” les propositions du ministre des Hydrocarbures, un spécialiste de la conservation confie à la Libre qu’à son avis le projet ne passera pas la rampe. Il est tout de même potentiellement dangereux. Car les rebelles Maï Maï, déjà impliqués dans la pêche illégale sur le lac Edouard, aux confins du Parc des Virunga, pourraient s’engouffrer dans les espaces abandonnés par les éco-gardes de l’Institut congolais pour la conservation de la nature. En effet, les sociétés de sécurité privées engages par les compagnies pétrolières n’ont pas vocation à protéger la faune et la flore. Cette même source veut croire que le Comité interministériel qui doit encore se prononcer sur la proposition du ministre des Hydrocarbures, va la rejeter en raison de l’opposition du ministre de l’Environnement, Amby Ambatobe.
Moins optimiste. un autre spécialiste de la conservation estime qu’Ambatobe est sur un siège éjectable et ne fait pas le poids face à Ngoi Mukena, proche du Président. Plusieurs éléments augurent d’ailleurs de la volonté politique d’exploiter le pétrole des parcs.
Le Président Kabila a signé le 1er février dernier une ordonnance approuvant le contrat de partage de production entre la RDC et la joint venture formée par la Société nationale des hydrocarbures du Congo (Sonahydroc) et la Compagnie minière du Congo de l’homme d’affaires grec, Adonis Pouroulis lui permettant d’entamer ses activités sur les blocs 1 et 2 de la Salonga
Bras de fer
En septembre 2017, la lettre Africa Energy Intelligence de Paris a révélé que la Sonahydroc, avait signé un « accord de principe » concernant la reattribution du le bloc V du Graben Albertine, empiétant sur le parc des Virunga à la société Oil Quest International,.
La partie de bras de fer n’est donc pas gagnée pour les défenseurs de l’environnement carAimé Ngoi Mukena a bétonné sa démarche au plan juridique. Dans sa note au gouvernement, il rappelle que la loi du 1er août 2015, sur les hydrocarbures prescrit que “pour cause d’utilité publique, un décret délibéré en conseil des minitres peut autoriser les activités d’exploration” dans les parcs, En outre, écrit le ministre, la Convention de l’UNESCO sur la protection du patrimoine mondial de 1972 admet la possiblité d’exploitation dans les parc nationaux. Enfin, la législation congolaise autorise la révision unilatérale des accords instituant les aires protégées si l’intérêt national l’exige.